En 1920 se tient la toute première élection de Miss France. À cette époque, ledit titre n'existe pas encore, et l'organisation du concours est bien différente de ce que nous connaissons aujourd'hui. Par exemple, il n'y a pas d'élues régionales, et Agnès Souret ne porte pas à proprement parler le titre de Miss Pays Basque. Cependant, dans les faits, elle reste la toute première jeune femme à représenter le Pays Basque lors d’un concours national. Élue "plus belle femme de France", elle est considérée comme la première Miss France.
Cette même année, les journalistes mondains Maurice de Waleffe et Michel de Brunhoff lancent l’élection de "La plus belle femme de France", en partenariat avec la société cinématographique Éclair. Originaire du Pays Basque, Agnès Souret, qui admire Sarah Bernhardt et rêve de devenir actrice, voit dans ce concours une opportunité unique. Elle envoie une photo d’elle en tenue de communiante, accompagnée de ces mots audacieux : "Je n’ai que 17 ans, dites-moi si je dois traverser la France pour courir ma chance". Sa candidature est retenue par un jury de présélection composé d’artistes et d’écrivains.
Les 49 jeunes femmes sélectionnées sont réparties en groupes de sept et identifiées par des noms de fleurs, de pierres précieuses ou encore de déesses. C’est au cinéma, avant les projections de films, que les spectateurs sont invités à voter. À leur arrivée, ils reçoivent une carte postale illustrée avec les photos des sept candidates du groupe, accompagnées de leurs caractéristiques. Les portraits des participantes (en pied, en buste et en groupe) sont également diffusés à l’écran. Chaque spectateur classe ensuite les candidates par ordre de préférence. Agnès Souret, surnommée "L’Émeraude", remporte un plébiscite dans sa série avec 75 % des voix. Elle accède ainsi à la finale, où elle décroche le titre tant convoité avec près de 50 % des suffrages.
Auréolée de ce succès, au retentissement national et international, la jeune femme voit sa vie transformée, à l’image des Miss France d’aujourd’hui.
Dès 1920, elle réalise son rêve de devenir actrice et obtient un rôle dans le film Le Lys du Mont-Saint-Michel. Sa carrière se poursuit sur scène, notamment aux Folies-Bergère et au Gaiety Theatre de Londres. Agnès Souret devient également une femme d’affaires visionnaire : elle prête son nom à une gamme complète de produits cosmétiques, vendus avec un ouvrage intitulé Les secrets de beauté d’Agnès Souret. Mais malgré ce nouveau train de vie, elle reste profondément attachée à son Pays Basque natal, où elle aime se réfugier pour se ressourcer, notamment dans sa maison Ederrena ("chez la plus belle" en basque), à Espelette.
Hélas, en 1928, son destin bascule tragiquement. En tournée promotionnelle en Argentine pour son troisième film, elle est hospitalisée en urgence et succombe à une péritonite aiguë à l’âge de 26 ans. Son corps est rapatrié à Espelette, où elle repose dans un mausolée en marbre rose, chef-d’œuvre de style Art Déco. L’édifice, conçu comme un édicule antique avec un médaillon sculpté par Lucien Danglade et un vitrail des frères Mauméjean, est classé monument historique depuis 2006, grâce au maire de l’époque, Andde Darraidou.
Malgré une vie trop courte, Agnès Souret a laissé une empreinte indélébile. Première élue d’un concours qui perdure encore, elle a ouvert la voie à des générations de jeunes femmes déterminées à vivre leurs rêves et à représenter fièrement leur région. Véritable pionnière, elle incarne encore aujourd’hui l’esprit et les valeurs que portent les Miss France : élégance, audace et rayonnement.
Sources : "Miss France 1920-2020", Sylvie Tellier, Hors Collection Edi8, 2020 & "Agnès Souret, la plus belle femme de France", Jérôme Zapata,
Atlantica, 2024.